À partir d’aujourd’hui,
je vais coucher si je peux chez
M. Domballe, que tu connais.
J’ai été content de le trouver dans
ce patelin perdu. Fais-moi signe dès que
tu pourras : je te tiendrai au courant autant
qu’il me sera possible. Si tu vois des parents
ou des amis, dis-leur où je suis et que je serai
content de recevoir des lettres.
Au revoir, j’ai confiance et bon espoir
et je t’embrasse de tout cœur.
Maurice »
Chaque soir, après le service, Maurice Genevoix
note les impressions de la journée. Le 25 août
1914, il quitte Châlons-sur-Marne et rejoint la zone
d’affrontement au nord de la Meuse. Il commence,
sans le savoir, un des plus beaux témoignages
de la Grande Guerre :
Ceux de 14
.
[Amicale les Revenants
et Anciens du 106
e
ri]
La rapidité des événe-
ments a pris de court
les populations. Quelques
manifestations d’enthousias-
me patriotique et belliciste, que
la propagande met en valeur, ont lieu
dans les grandes villes. Pour la majorité
de la population, l’état d’esprit est plutôt à
la surprise et à la consternation, notamment
dans les campagnes où les travaux des champs
ont commencé, avant qu’un sens du devoir
empreint de gravité ne l’emporte, dans un contexte
d’« Union sacrée ».
À Sommepy, petit village du nord de la Marne,
la fillette Blanche Braconnier décrit la gravité de
la situation et le sentiment d’inquiétude régnant
dans toutes les campagnes de France :
« J’ai 11 ans lorsque la guerre éclate. La rumeur
et les mines sombres des grandes personnes annon-
çaient des bouleversements dans la vie bien tran-
quille de notre commune. Je découvre maintenant
l’affiche de la mobilisation. Quelle tristesse de voir
ces mères et ces sœurs en larmes qui accompagnent
les hommes à la gare. Moi, comme les autres enfants,
je distribue des fleurs et des boissons aux mobilisés
prêts à monter à bord des trains. A l’école, les filles
confectionnent par avance des bandes de tissu
destinées aux blessés. »
[Association du Souvenir
de Sommepy-Tahure]
10
la marne dans la grande guerre
Képi modèle 1884 du 106
e
ri,
garnison de Châlons-sur-Marne.
© Collection privée
